Gault&Millau et Michelin : tous les écarts de notation
Aussi attendus que redoutés chaque année, les classements du Guide Michelin et du Gault&Millau font la pluie et le beau temps au sein du paysage gastronomique français. D’expérience, chaque établissement sait que le simple fait de perdre une étoile ou une toque retentira directement sur sa fréquentation et sa rentabilité. Pour autant, à y regarder de plus près, ces deux guides emblématiques n’accordent pas toujours leurs violons. Quelles différences de notes entre Michelin et Gault&Millau font vraiment débat ? Comment expliquer de tels écarts dans les évaluations ?
Des exemples de différences entre Michelin et notes Gault&Millau
Chez Toutpourleresto, nous nous sommes prêtés à un petit exercice : collecter les notes Gault&Millau et les étoiles Michelin de tous les restaurants étoilés pour pouvoir les confronter et les analyser. Parmi les exemples les plus frappants au 21 décembre 2023, on peut évoquer les suivants :
- Sur environ 630 restaurants étoilés, une quarantaine ne sont pas référencés ou pas notés par le Gault&Millau.
- 2 restaurants étoilés décrochent un tout petit 11/20 et 7 autres accusent un bien modeste 12/20.
- Une soixantaine de restaurants étoilés ne dépassent pas la barre du 13/20 au Gault&Millau. On dénombre pourtant 1600 restaurants en France avec une note supérieure à 13/20 !
- Le haut du tableau sème aussi la discorde. Plusieurs 2 étoiles doivent se contenter d’un 14.5/20. La note est plus qu’honorable… mais près de 250 restaurants 1 étoile sont mieux notés par le Gault et Millau ! Une différence de taille entre les deux guides.
- Certains établissements 1 étoile atteignent par ailleurs des notes extraordinairement élevées, de l’ordre du 17,5/20 ou même 18 ! Cette dizaine d’établissements dépasse même des tables triplement étoilées ! On pense à la Table des Frères Ibarboure* ou à Michel Sarran*, qui surpassent par exemple le Clos des Sens***. Quant à la table 1 étoile la mieux notée du Gault&Millau, elle surclasse pratiquement tous les restaurants 2 étoiles…
- Même les chefs « intouchables » aux 5 Toques d’or Gault&Millau ne remportent pas toujours les faveurs du Guide rouge : Michel Trama* n’est récompensé que d’une étoile Michelin, Guy Savoy** et l’Auberge de l’Ill** (Marc Haeberlin) n’ont que 2 étoiles chacun. Quant au chef de l’année 2024, désigné par le Gault&Millau, il est distingué de « seulement » 2 étoiles : il s’agit de Yoann Conte.
Vous l’avez compris : les différences sont importantes… Et que ce soit en haut, en bas ou même en milieu de tableau, les deux principaux guides gastronomiques de France ont bien du mal à s’accorder. Vous voulez savoir en un coup d’oeil quel est le restaurant 1, 2 ou 3 étoiles avec la meilleure note ? En quelques clics, vous pourrez profiter d’un accès intégral au seul fichier sur internet qui associe les tables étoilées de l’Hexagone à leurs notes Gault&Millau !
Notes Gault&Millau et étoiles Michelin : quels critères et quelles différences ?
Le fonctionnement interne des deux guides est relativement similaire. Chaque inspecteur réserve et teste chaque année des centaines de restaurants de manière anonyme. Il paye son addition sans sourciller la plupart du temps ; à de rares occasions, toutefois, il se présente en fin de repas pour discuter avec le chef. Les tables peuvent être jugées plusieurs fois par an, et l’évaluation est bien sûr réalisée selon une grille de critères précis. L’objectif est bien sûr de contrôler la qualité dans la durée.
Il existe néanmoins des différences de taille susceptibles d’expliquer les disparités observées dans les notations :
- Le positionnement historique. Alors que le Michelin soutenait plus volontiers les maisons de tradition, le Gault&Millau s’est positionné dès sa création comme un dénicheur de talents et un promoteur de la « Nouvelle Cuisine », plus légère et créative. Plus jeune, le Gault&Millau met aussi en avant des talents en devenir et des concepts culinaires innovants. Bien que le Guide rouge se soit modernisé au cours des dernières décennies, il n’en reste pas moins que l’un s’est construit en opposition de l’autre.
- Le rapport des jurés à la restauration. La philosophie des deux guides étant différente, il est logique que les inspecteurs évaluent les établissements en fonction de critères différents. Les profils de ces professionnels peuvent également différer. Dans le Guide rouge, ils doivent justifier d’une solide expérience de 10 ans minimum dans l’hôtellerie-restauration. Au Gault&Millau, on fait confiance à des gourmets éclairés qui fréquentent assidûment les bonnes tables, exactement comme ses fondateurs. L’approche n’est pas la même, et est logique que la technicité du Michelin ne trouve pas toujours écho dans le jugé du Gault&Millau.
- La fréquence de mise à jour. si les deux guides mettent à jour leur classement annuellement, le Gault&Millau s’autorise des révisions plus régulières que le Michelin : un restaurant peut en effet gagner ou perdre un demi-point sur sa note à tout moment. Du côté du Guide rouge, en revanche, l’attribution ou la perte des étoiles fait l’objet d’une cérémonie annuelle, qui se déroule généralement au 1er trimestre de l’année. Cela peut conduire à des différences dans les classements, notamment sur la fin d’année.
- La subjectivité. Même si un inspecteur se doit d’être aussi objectif que possible, il existe évidemment un élément de subjectivité dans l’évaluation des restaurants (comme dans toute critique, dans quelque domaine que ce soit !).
- Enfin, dernier critère expliquant les différences entre les deux guides (et non des moindres)… Le marketing, tout simplement ! Le Gault&Millau comme le Michelin sont deux entreprises qui ont besoin d’exister et de vendre leurs guides… Impossible de produire le même classement que le concurrent ! Elles doivent se démarquer l’une de l’autre et, parfois, créer l’événement en ajoutant (ou retirant !) une étoile ou une toque à un chef, aussi connu soit-il.
Deux guides gastronomiques, deux histoires
L’histoire du Guide Michelin débute lors de l’Exposition universelle de 1900. Bien loin de son format actuel, il se présentait alors comme un guide publicitaire gracieusement offert aux acheteurs des pneus de la marque. C’est uniquement à partir de 1920 qu’il met en lumière des restaurants et devient payant. Si le guide rouge comprend aujourd’hui plusieurs distinctions (couvert, assiette, Bib Gourmand…), les étoiles restent le système de notation le plus connu et le plus scruté : 1 étoile sera ainsi décernée pour « une cuisine de grande finesse », 2 étoiles pour « une cuisine d’exception » et 3 étoiles (la récompense suprême) pour « une cuisine unique ». Parmi les valeurs chères aux inspecteurs, la qualité des ingrédients, la maîtrise technique, l’harmonie des saveurs, l’émotion véhiculée dans l’assiette et la régularité. L’étoile verte, dernière-née du guide, salue plus spécifiquement les acteurs de la cuisine durable.
Le Gault&Millau, lui, fait son apparition officielle en 1972 sous l’impulsion de deux journalistes du quotidien Paris-Presse, Henry Gault et Christian Millau. Tous deux souhaitent partager avec leurs lecteurs leurs adresses « coup de cœur ». Le classement repose sur une note sur 20 traduite en toques à partir de 11/20 – le maximum de 5 toques équivalant à plus de 19/20. Sont ici valorisés le goût, la qualité, la créativité et la simplicité de l’assiette. Pour les deux guides, il convient de rappeler que le cadre du restaurant n’entre théoriquement pas en ligne de compte.
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