Droit de bouchon : tout ce que vous devez savoir
Alors que les Français font de plus en plus attention à leurs dépenses, le droit de bouchon commence peu à peu à se populariser dans le milieu de la restauration. De quoi s’agit-il ? Comment peut-on le mettre en place ? Est-il vraiment judicieux ? On fait le point.
Qu’est-ce que le droit de bouchon ?
Le droit de bouchon correspond à la somme qu’un client doit régler au gérant d’un établissement pour pouvoir apporter sa propre bouteille d’alcool et se la faire servir à table. On peut le comprendre comme une compensation financière non seulement destinée à pallier le manque à gagner du restaurateur, qui aurait pu proposer ses propres bouteilles, mais aussi à couvrir les coûts liés au chambrage, service, nettoyage des verres…
La pratique du droit de bouchon n’est pas nouvelle. Elle remonte en réalité au XVIIIe siècle ! Ce sont les traiteurs qui furent les premiers à le mettre en place lors des mariages et banquets pour se dédommager. À la fin de la fête, ils s’attelaient ainsi à compter les bouchons pour calculer leur dû. Longtemps tombé en désuétude, ce modèle est remis au goût du jour dans les pays anglo-saxons durant les années 1970 sous le concept du « Bring Your Own Bottle » (BYOB), littéralement « apportez votre propre bouteille ». Une façon d’attirer une nouvelle clientèle, certes, mais aussi de remplir les établissements ne possédant pas de licence de débit de boissons alcoolisées…
En pratique, comment ça marche ?
Il n’existe à ce jour aucune loi encadrant le droit de bouchon. Il s’agit donc d’un usage plus que d’un droit. Chaque restaurateur ou traiteur demeure ainsi libre de l’appliquer ou non, et a fortiori d’accepter ou non qu’un client vienne directement avec sa bouteille.
En France, tout établissement disposant d’une licence restaurant (équivalent licence IV) peut en théorie revendiquer le droit de bouchon sur le plan administratif. Pour la mise en œuvre pratique, s’il subsiste un certain flou juridique, une lettre d’information en date du 23 mai 2017 adressée à l’hôtellerie-restauration stipule que les gérants d’établissement doivent normalement faire signer un « accord de banquet dans lequel sont clairement mentionnés la catégorie et le nombre de bouteilles apportées par le client, ainsi que le montant des droits demandés par le professionnel ».
Quel est le prix d’un droit de bouchon ?
Il n’existe pas de tarif fixe pour le droit de bouchon. Celui-ci varie selon la nature de l’établissement (gastronomique ou non), de la situation client (mariage, repas familial, clientèle d’habitués…) et de la base de calcul (à la bouteille, au lot…).
Si de rares restaurateurs proposent à leurs clients d’amener gratuitement leurs vins ou leurs bières, il est dans la majorité des cas demandé entre 5 et 10 € par bouteille dans un restaurant classique. Cette « taxe » peut grimper jusqu’à 20 ou 30 € dans les établissements les plus prestigieux. Dans le cas plus spécifique des traiteurs lors d’un mariage, les tarifs moyens appliqués oscillent généralement entre 4 et 7 €.
Quels avantages et quels inconvénients ?
Instaurer ou non le droit de bouchon dans son établissement pose un vrai dilemme. D’un côté, le restaurateur accuse un gros manque à gagner, la marge dégagée par la vente des boissons alcoolisées étant très conséquente. Avec des bouteilles revendues 3 à 4 fois plus chères, le vin représente à lui seul entre 40 et 50 % des bénéfices pour un restaurant gastronomique.
De l’autre, il faut aussi se mettre à la place du client, qui n’est pas toujours prêt à débourser des sommes astronomiques pour remplir son verre (surtout en ces périodes de crise), ou qui peut au contraire souhaiter déguster un vin prestigieux ! Il n’est pas rare qu’un client marque une occasion en débouchant un vin spécifique, dont la mise en bouteille remonte par exemple à l’année d’un mariage ou d’une naissance. Ces bouteilles coutent bien souvent plusieurs centaines d’euros et ne sont pas toujours disponibles dans les caves des restaurants.
Dans les faits, l’application du droit de bouchon reste encore très timide en France. Pour ceux qui s’y sont déjà essayés, le bilan est contrasté. Si certains gérants parviennent à y trouver leur compte, avec des clients qui « se lâchent plus » sur les apéritifs, les desserts ou les digestifs, d’autres ont essuyé un véritable échec, avec une clientèle ne jouant pas franchement le jeu et ne consommant quasiment rien à côté. Bilan ? Le droit de bouchon peut payer… mais pas toujours.
Comment mettre en place le droit de bouchon dans son restaurant ?
Pour appliquer le droit de bouchon sans trop y perdre au change, plusieurs stratégies sont envisageables :
- Réservez le droit de bouchon aux habitués et grandes tablées. Si vous disposez d’une carte des vins très étoffée, systématiser le droit de bouchon risque de fragiliser considérablement votre activité. Accorder ce privilège aux bons clients ou aux événements particuliers peut constituer un juste compromis.
- Décrétez une soirée « droit de bouchon » fixe par semaine. Si vous êtes frileux à l’idée de tenter l’expérience, commencez par instaurer le droit de bouchon un soir par semaine pour tâter le terrain. Au bout de 1 ou 2 mois, analysez les retombées économiques de ce modèle pour voir s’il peut s’inscrire de façon pérenne dans votre activité.
- Déclinez le droit de bouchon selon différentes formules. Vous pouvez aussi accepter l’apport gratuit d’une bouteille en échange de certaines conditions compensatoires. Plusieurs formats dérivés peuvent dans ce cas être proposés :
- la formule « gourmande »: le client peut venir gratuitement avec sa bouteille de vin si tous les convives de la table commandent un menu complet (entrée + plat + dessert) ;
- la formule « 1 contre 1 »: le client peut apporter gratuitement une bouteille de vin si une autre est achetée sur place ;
- la formule « champagne »: le client peut venir avec sa bouteille de champagne à condition de commander un dessert.